Prime d'usage et prime exceptionnelle : jurisprudence et droit
La prime d'usage doit être distinguée d'une prime exceptionnelle. Voici comment reconnaître une prime d'usage afin de savoir si son versement s'impose à l'entreprise.
Quelles sont les conditions d'existence d'une prime d'usage ?
Un salarié peut réclamer le versement d'une prime à son employeur dès lors qu'elle constitue une prime d'usage, qui doit être distinguée d'une simple prime exceptionnelle. La jurisprudence a défini plusieurs critères pour distinguer les primes d'usage des simples libéralités consenties de façon exceptionnelle par l'employeur. Selon les tribunaux, pour constituer un usage le versement de la prime doit présenter à la fois un caractère constant, fixe et général.
Une prime versée à titre d'usage constant
Pour être considérée comme une prime d'usage, la prime doit déjà avoir été versée un certain nombre de fois au cours des années précédentes. Au regard de la jurisprudence, le versement d'une prime annuelle ne semble constituer un usage qu'à partir de la troisième année de paiement. En effet, concernant les gratifications versées annuellement, la Cour de Cassation a déjà pu considérer que le versement d'une prime depuis 3 années présentait bien un caractère constant (arrêt n° 05-43834 rendu par la chambre sociale de la Cour de Cassation le 20 mars 2007). En revanche, une prime annuelle qui n'a déjà été versée que deux fois n'est pas constitutive d'un usage dans l'entreprise (arrêt n°83-42105 rendu par la chambre sociale de la Cour de Cassation le 14 mars 1985). Mais cette règle n'est bien sûr pas absolue et la décision des juges dépend avant tout des circonstances du cas d'espèce leur étant présenté.
Une prime calculée via des critères fixes
Pour constituer une prime d'usage, les règles de calcul de la prime ne doivent pas varier d'une année sur l'autre au gré de décisions discrétionnaires de l'employeur. En revanche, le montant versé peut changer sans que le critère de fixité soit remis en question si les modalités de calcul sont restées les mêmes (exemple : lorsque la prime est calculée en fonction d'un pourcentage du salaire, son montant peut varier si le salaire augmente, mais les règles de calcul restent identiques). La jurisprudence considère par exemple qu'un versement ne constitue pas une prime d'usage si l'employeur en fixe le montant à partir de critères purement subjectifs sur la base du comportement et du mérite de chaque salarié (arrêt n° 81-42025 rendu par la chambre sociale de la Cour de Cassation le 5 octobre 1983).
Une prime versée de manière générale dans l'entreprise
L'ensemble du personnel doit pouvoir bénéficier de la prime, et non uniquement quelques salariés. Néanmoins, ce versement constitue également un usage s'il ne vise qu'une catégorie bien déterminée de salariés. La jurisprudence (arrêt n° 82-42115 de la chambre sociale de la Cour de Cassation rendu le 27 mai 1987) considère par exemple qu'une prime versée au seul personnel d'encadrement de l'entreprise pouvait constituer un usage. Certains membres du personnel n'entrant pas dans cette catégorie peuvent donc être exclus des bénéficiaires sans que l'existence d'un usage d'entreprise soit pour autant remise en question.
Si l'une de ces conditions n'est pas réunie, la gratification versée dans le passé n'est pas une prime d'usage. Elle est considérée juridiquement comme une simple prime exceptionnelle. Juridiquement, on parle alors de "prime bénévole" ou de "gratification bénévole". L'employeur peut dans ce cas librement décider de sa suppression ou de sa modification de manière unilatérale. Il peut donc choisir de ne pas verser de prime pour l'année en cours. A contrario, si l'ensemble de ces conditions sont réunies et que l'entreprise refuse le versement d'une prime d'usage, les salariés lésés ont la possibilité d'agir aux prud'hommes afin de contraindre l'employeur à leur verser la prime.
Quand le versement d'une prime est-il obligatoire ?
Avant d'adresser une demande de prime à votre employeur, il convient avant tout de savoir si le versement de la gratification concernée constitue ou non une obligation pour votre entreprise. La question ne se pose naturellement pas lorsque ce paiement est prévu de façon explicite dans votre contrat de travail, votre convention collective, un accord collectif ou dans un engagement écrit de l'employeur. Celui-ci est alors tenu de vous verser la gratification dans les conditions prévues par le texte. En cas de refus persistant de sa part, les salariés peuvent le contraindre à exécuter ses obligations via une action aux prud'hommes.
Le problème devient plus complexe lorsque ces versements ne relevaient jusqu'alors que d'une pratique ayant cours dans l'entreprise, sans pour autant qu'un texte ne formalise une quelconque obligation de l'employeur. Dans ce cas, le droit du travail prévoit la règle suivante : l'employeur ne peut être contraint de payer la gratification que si ces versements correspondent à un usage en vigueur dans l'entreprise, conformément aux critères listés ci-dessus.
En pratique, une prime versée par l'employeur à titre d'usage peut notamment prendre la forme :
- d'une prime d'ancienneté ;
- d'une prime de vacances ;
- d'une prime de risque ;
- d'une prime de bilan ;
- d'une prime de mariage ;
- d'une prime de fin d'année ;
- d'un 13ème mois ;
- d'une prime de panier.
En revanche, l'employeur ne peut pas rémunérer sous forme de prime exceptionnelle les heures supplémentaires accomplies par ses salariés.
L'employeur peut-il mettre fin à une prime d'usage ?
Lorsque le versement de la prime remplit ces critères et constitue un usage d'entreprise, l'employeur ne peut s'affranchir de ses obligations qu'après avoir régulièrement dénoncé l'usage en vigueur dans l'entreprise. Cette dénonciation lui permettra de ne plus verser la prime d'usage. Les représentants du personnel pourront tenter de négocier un accord pour obtenir des avantages en retour, mais la conclusion de cet accord ne constitue pas une condition de validité de la dénonciation de l'usage par l'employeur.
- Légifrance, arrêt n° 05-43834 : https://www.legifrance.gouv.fr/juri/id/JURITEXT000007529896
- Légifrance, arrêt n° 82-42115 : https://www.legifrance.gouv.fr/juri/id/JURITEXT000007076843
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