Vol au travail : plainte et sanction
Le vol au travail est malheureusement fréquent. Voici les règles du droit du travail sur la responsabilité de l'employeur en cas de vol et les sanctions contre un salarié qui vole sur son lieu de travail.
L'employeur est-il responsable en cas de vol au travail ?
Si on vous a volé sur votre lieu de travail, vous pouvez bien entendu porter plainte pour vol. Dans certains cas, il est également possible de mettre en cause la responsabilité de votre employeur devant les prud'hommes. Juridiquement, ce dernier est en effet considéré comme le dépositaire des objets personnels de ses salariés : il se trouve donc en principe soumis aux dispositions des articles 1927 et suivants du Code civil. L'article R. 4228-2 du Code du travail impose en outre à l'employeur de mettre en place des vestiaires collectifs dès lors que ses salariés sont obligés de porter des vêtements de travail spécifiques ou des équipements de protection individuelle. A défaut, l'employeur doit fournir un meuble de rangement sécurisé à ses salariés : un casier, une armoire, ou tout meuble muni d'une serrure ou d'un cadenas.
Mais la mise en cause de l'employeur en cas de vol subi au travail est relativement rare en pratique. Dans de nombreux cas, l'employeur pourra en effet se dégager de sa responsabilité. C'est le cas si le vol au travail est dû à un défaut de prudence ou de précaution du salarié (exemple : l'objet volé a été laissé sans surveillance sur le bureau du salarié ou dans un meuble de rangement n'ayant pas été fermé à clef) ou à un cas de force majeure. En outre, la responsabilité de l'employeur ne peut pas non plus être engagée s'il a fait afficher sur le lieu de travail une clause de non-responsabilité en cas de vol, sauf à prouver que l'employeur a commis une faute grave. En pratique, cette faute peut par exemple prendre la forme de locaux laissés ouverts et sans surveillance ou d'un laissez-faire de l'employeur en dépits de nombreux vols déjà constatés.
Quelle est la sanction d'un vol au travail ?
Si un salarié vole au travail, il s'expose à une sanction disciplinaire pouvant aller jusqu'au licenciement. En cas de plainte, il encourt 3 ans d'emprisonnement et 45 000 € d'amende sur le fondement de l'article 311-3 du Code pénal réprimant le vol. En pratique, il est fréquent que le salarié fautif soit licencié pour faute grave. Selon la jurisprudence, ce type de vol n'est toutefois pas toujours assimilable à une faute grave dans la mesure où les juges prennent en compte le montant du vol et le comportement passé du salarié concerné. La Cour de cassation a ainsi déjugé un employeur qui avait engagé une procédure de licenciement pour faute grave alors qu'il n'avait eu aucun reproche à adresser au salarié durant les sept années précédentes et que le vol portait sur un objet de faible valeur (arrêt n°06-43501 rendu par la chambre sociale de la Cour de Cassation du 29 janvier 2008). La Cour de Cassation (arrêt n°15-14597 rendu par la chambre sociale le 6 octobre 2016) a également considéré que le vol d'une marchandise de valeur dérisoire ne pouvait caractériser une faute grave d'un salarié ayant 6 ans d'ancienneté, des faits similaires déjà commis par lui n'ayant jamais fait l'objet d'un avertissement de la part de son employeur.
Le vol entre collègues est également une pratique constatée dans certains lieux de travail. L'employeur peut potentiellement licencier le salarié qui volerait un collègue dans les locaux de l'entreprise. En revanche, cette sanction n'est pas permise par les tribunaux dès lors que le vol intervient dans le cadre de la vie personnelle. C'est ce qu'a jugé la Cour de Cassation (arrêt n° 05-45294 de la chambre sociale du 19 septembre 2007) dans le cas d'un vol commis sur le véhicule d'un collègue de travail garé à l'extérieur de l'entreprise.
Pour être sanctionné par l'employeur, le vol doit être lié la vie professionnelle du salarié. La Cour de Cassation (arrêt de la chambre sociale n° 18-18317 rendu le 8 juillet 2020) a par exemple considéré que le vol commis par un steward dans un hôtel partenaire de la compagnie aérienne qui l'emploie était rattachée à sa vie professionnelle et non à sa vie privée. L'employeur était dès lors en droit de licencier son salarié pour faute grave.
- Légifrance, article R. 4228-2 du Code du travail : https://www.legifrance.gouv.fr/codes/article_lc/LEGIARTI000033218665
- Légifrance, article 1927 et suivants du Code civil : https://www.legifrance.gouv.fr/codes/section_lc/LEGITEXT000006070721/LEGISCTA000006150317/
- Légifrance, article 311-3 du Code pénal : https://www.legifrance.gouv.fr/codes/article_lc/LEGIARTI000006418131
- Cour de Cassation, arrêt n° 06-43501 : https://www.courdecassation.fr/decision/613726b8cd58014677427e1d
- Cour de Cassation, arrêt n° 15-14597 : https://www.courdecassation.fr/decision/5fd91e3b6ab6cabaf4d81e89
- Cour de Cassation, arrêt n° 05-45294 : https://www.courdecassation.fr/decision/61372513cd5801467741ac68
- Cour de Cassation, arrêt n° 18-18317 : https://www.courdecassation.fr/decision/5fca4b962fd47d5ae944e989
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