Donner sa démission d'un CDI : préavis, chômage et congés
La démission d'un CDI doit respecter la procédure du Code du travail, notamment pour le préavis. Comment démissionner dans les règles, avec les effets sur le chômage et les congés payés.
Qu'est-ce qu'une démission ?
La démission est l'acte par lequel un salarié rompt son contrat de travail de sa seule initiative. Elle entraîne la rupture unilatérale du contrat de travail sans nécessiter l'accord de l'employeur. La démission doit être distinguée du licenciement, qui est à l'initiative de l'employeur, et de la rupture conventionnelle, où les parties signent une convention pour mettre fin au contrat d'un commun accord.
Le Code du travail ne donne pas de définition de la démission. Cette dernière est d'ailleurs peu encadrée par la loi. Le Code du travail contient néanmoins quelques articles sur la démission, notamment en ce qui concerne le préavis à respecter par le salarié (article L. 1237-1 du Code du travail) et les cas de démission abusive (articles L. 1237-2 et L. 1237-3). En principe, tout salarié en CDI peut démissionner à tout moment, sans avoir à justifier sa décision. Mais la démission est soumise toutefois à certaines formalités qu'il faut connaître.
Quelle forme doit prendre une démission ?
Contrairement au licenciement, la démission n'est en principe soumise à aucune condition de forme : en théorie, elle peut même être donnée oralement. Mais dans un souci de formalisme, mieux vaut envoyer une lettre recommandée avec accusé de réception (pour ce faire, le salarié peut s'aider d'un modèle de lettre de démission), ne serait-ce que pour prendre date. Le salarié n'a pas à indiquer les motifs de sa décision dans sa lettre de démission : un salarié peut donc poser sa démission sans donner de raisons. Quelle que soit la forme choisie, la démission doit être donnée en toute connaissance de cause et il ne doit y avoir aucun doute quant aux réelles intentions du salarié. La démission doit donc provenir d'une volonté claire et non-équivoque de quitter l'entreprise.
En pratique, la démission est le plus souvent adressée à l'employeur sous la forme d'une lettre dans un souci de preuve. Mais une démission peut être verbale ou prendre la forme d'un simple e-mail. Ces deux formes sont toutefois déconseillées. La première dans un souci de preuve, une démission à l'oral étant plus difficile à prouver qu'une démission par écrit. La seconde pour une raison de délai, un email pouvant ne pas être lu par l'employeur.
Un salarié peut contester la véracité d'une lettre de démission qui lui est attribuée. Dans ce cas là, les juges doivent procéder à une vérification d'écriture (arrêt n° 21-10385 du 19 mai 2022 rendu par la 2e chambre civile de la Cour de Cassation).
Qu'est-ce qu'une démission forcée ?
La démission forcée est celle donnée sous la contrainte ou la menace. Elle est alors assimilée à un licenciement par les tribunaux, la charge de la preuve incombant au salarié. Il en est de même quand le salarié cesse son travail à la suite du non-paiement du salaire. Exemple : la démission donnée par une salariée suite à une menace de plainte pour vol de son employeur n'est pas valable, quand bien même la salariée aurait reconnu les faits dans une lettre signée (arrêt n° 17-26794 de la chambre sociale de la Cour de Cassation rendu le 23 janvier 2019).
Le salarié victime de ces pressions (harcèlement, etc.) peut revenir sur sa démission et se rétracter : la démission doit, en effet, traduire une volonté claire et non équivoque, sans vice de consentement. C'est ensuite aux Prud'hommes de juger le litige en première instance en cas de contestation. D'une manière générale, les tribunaux examinent la validité de la démission du salarié en vérifiant l'existence, par exemple, d'un litige antérieur.
- Soit les tribunaux considèrent que la rétractation du salarié n'est pas fondée et la démission produit ses effets normaux.
- Soit ils jugent que la démission a été entraînée par le comportement fautif de l'employeur. La rupture du contrat de travail par le salarié est alors assimilée à un licenciement sans cause réelle et sérieuse. Et l'employeur est condamné à verser au salarié les indemnités et dommages-intérêts prévus la loi ou la convention collective. Le salarié, de son côté, pourra bénéficier des allocations chômage.
Une absence injustifiée est-elle assimilable à une démission ?
L'absence injustifiée du salarié, par exemple après un congé payé ou une maladie, ne peut être assimilée à une démission. L'employeur doit d'abord lui envoyer une mise en demeure de reprendre le travail, et à défaut de réponse, enregistrer sa démission. Cette absence peut aussi déboucher sur un licenciement pour faute.
De même, le salarié qui abandonne son poste après une modification de son contrat de travail n'est pas considéré comme démissionnaire. Si le désaccord persiste, l'employeur devra engager une procédure de licenciement. Et dans cette situation, il devra payer les indemnités de droit commun si la modification porte sur le contrat lui-même et non sur les seules conditions de travail. Dans le cas contraire, si le salarié a quitté son poste en refusant une simple modification de ses conditions de travail, il peut être licencié pour faute.
Peut-on présumer une démission ?
La démission d'un salarié ne se présume pas. Elle doit être sans équivoque. La jurisprudence (arrêt n° 15-17549 rendu par la chambre sociale de la Cour de Cassation le 6 octobre 2016) a ainsi considéré que n'était pas démissionnaire un salarié n'ayant jamais retrouvé son poste après un arrêt de travail, et ce alors même qu'il ne s'était pas manifesté auprès de son entreprise pendant 4 ans !
A l'inverse, un salarié est considéré par les tribunaux comme ayant manifesté clairement et de façon non-équivoque sa volonté de démissionner dès lors qu'il ne se rendait plus à son travail, qu'il avait indiqué à plusieurs personnes avoir mis fin à sa relation de travail et qu'il n'avait repris le contact avec son employeur que 3 mois plus tard (arrêt n° 15-17390 du 20 octobre 2016).
Peut-on revenir sur une démission ?
Quand la démission est donnée dans un mouvement d'humeur, de colère, sous le coup d'une forte émotion, etc. les tribunaux reconnaissent au salarié le droit de changer d'avis rapidement. Cette rétractation s'impose à l'employeur. Si celui-ci refuse de prendre en compte le changement d'avis du salarié, la rupture du contrat de travail est assimilée à un licenciement et l'employeur doit en assumer les conséquences légales et financières.
Mais naturellement, le salarié doit revenir sur sa démission dans un délai raisonnable. Tel n'est pas le cas, par exemple, d'un délai de 2 mois, jugé trop tardif (chambre sociale de la Cour de Cassation, arrêt n° 06-43871 du 5 décembre 2007). En revanche, la rétractation d'une démission par le biais d'une lettre adressée 5 jours après sa notification et dans laquelle le salarié fait part à son employeur des griefs à son encontre a été considérée comme valable (arrêt n° 18-25155 rendu par la chambre sociale de la Cour de Cassation le 20 novembre 2019).
Pour demander sa réintégration dans l'entreprise, le salarié peut s'aider d'un modèle de lettre d'annulation de démission. La démission devient en tous les cas caduque si le salarié poursuit son travail après l'expiration du préavis et du délai des congés payés.
Quel est le délai de préavis en cas de démission ?
Sauf dans certains cas, le salarié qui démissionne ne peut pas quitter l'entreprise du jour au lendemain : il doit ainsi respecter une période de préavis. La durée du préavis est fixée par la loi, par la convention collective ou à défaut par les usages, sauf stipulation contraire plus favorable du contrat de travail. Dans certains cas, le salarié est néanmoins dispensé de tout préavis :
- quand il s'agit d'une femme en état de grossesse apparente,
- à la fin du congé de maternité ou du congé pour création d'entreprise,
- quand l'employeur ne respecte pas ses obligations (non-paiement du salaire, modification du contrat...),
- pendant la période d'essai,
- ou encore en cas d'accord amiable avec l'employeur pour ne pas l'exécuter.
Le préavis est-il suspendu pendant les congés payés ?
L'absence pour maladie, maternité ou grève n'entraîne pas la suspension du préavis. En revanche, le préavis est suspendu pendant les congés payés du salarié et le terme du préavis est donc reculé d'autant. Il peut arriver qu'au moment de la notification de la rupture (démission ou licenciement), aucune période de congés payés n'ait été fixée. Dans ce cas, ni l'employeur ni le salarié ne peuvent imposer unilatéralement une période de congés payés. Mais ils peuvent convenir d'un commun accord qu'une période de congés payés aura lieu pendant le préavis, ce qui ne suspend pas le contrat de travail. En résumé :
- Soit une période de congés payés a été prévue avant le début du préavis (notification de la rupture). Dans ce cas, le terme du préavis est reculé de la durée des congés prévus.
- Soit le salarié et l'employeur s'accordent après la notification de la rupture pour insérer des congés payés pendant le préavis. Dans ce cas, le préavis n'est pas suspendu pendant la durée des congés. Sauf accord naturellement des deux parties.
La démission pendant un arrêt maladie est soumise à des règles spécifiques en matière de préavis.
Le salarié qui refuse d'exécuter son préavis peut être condamné à des dommages-intérêts. Il doit percevoir à la fin du préavis l'ensemble des éléments de sa rémunération (primes, treizième mois, participation aux bénéfices, indemnités de congés payés, etc.).
Peut-on dispenser de préavis un salarié qui démissionne ?
Lorsqu'un préavis s'impose au salarié, celui-ci doit l'exécuter. L'employeur peut toutefois choisir de dispenser le salarié d'effectuer son préavis. Il peut le faire à son initiative ou à la demande du salarié. Dans ce second cas, l'employeur est libre d'accepter ou non la demande de dispense de préavis. S'il refuse, le salarié devra l'effectuer sous peine de devoir verser à l'employeur une indemnité égale au montant de la rémunération qu'il aurait touchée pour la période qui aurait dû être travaillée.
Un employeur peut-il refuser une démission ?
Un employeur ne peut pas refuser la démission d'un salarié : la démission n'est pas conditionnée par son accord et le salarié est toujours libre de quitter son entreprise s'il le souhaite. L'employeur doit donc se contenter de prendre acte de la démission qui lui est adressée. Mais attention : cette règle s'applique lorsqu'il s'agit d'un CDI. Le principe est différent lorsqu'il s'agit d'un CDD.
Peut-on démissionner d'un CDD ?
Le salarié ne peut pas démissionner pendant un contrat à durée déterminée, sauf s'il part pendant la période d'essai ou s'il trouve par ailleurs un contrat à durée indéterminée. Toutefois, le salarié peut quitter l'entreprise en cas d'accord avec son employeur. Cet accord doit alors être formalisé par un écrit.
Quelles sont les indemnités versées en cas de démission ?
La démission ne donne naturellement pas droit aux indemnités de licenciement. Mais le salarié démissionnaire peut néanmoins bénéficier de certains versements... sous conditions. Le salarié a droit à une indemnité compensatrice de préavis dès lors que l'employeur, sur décision expresse, choisit de le dispenser d'effectuer son préavis. Cette somme correspond au salaire que le salarié aurait normalement touché s'il avait effectué son préavis. Si le salarié n'a pas pu prendre tous ses jours de congés payés acquis avant la date de rupture du contrat de travail, il a également droit à une indemnité compensatrice de congés payés. Lorsque le salarié quitte l'entreprise, l'employeur lui remet son solde de tout compte qui récapitule l'ensemble des montants versés par l'employeur au moment du départ du salarié.
Le salarié qui démissionne doit penser à consulter son contrat de travail. Si ce dernier prévoit une obligation de non-concurrence à son encontre après la rupture du contrat, le salarié doit en contrepartie toucher une indemnité de non-concurrence.
La démission donne-t-elle droit au chômage ?
En principe, la démission ne donne pas droit au chômage, contrairement au licenciement. Toutefois, certaines démissions légitimes donnent droit aux indemnités chômage lorsque le salarié remplit certaines conditions.
Quels documents remettre au salarié qui démissionne ?
La démission, comme toutes les ruptures de contrat de travail, impose la remise de certains documents au salarié qui quitte l'entreprise. En plus du solde de tout compte, l'employeur doit obligatoirement remettre un certificat de travail et une attestation Pôle emploi au salarié.
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