Nuisances avec un bar et non-respect du règlement copro

Jeremy22 -  
_lael_ Messages postés 6076 Date d'inscription   Statut Membre Dernière intervention   -

Bonsoir,

Je sollicite votre aide et vos conseils juridiques concernant une situation qui devient insupportable pour ma famille et les habitants de mon immeuble.

Un bar a ouvert en décembre dernier au rez-de-chaussée de notre immeuble, dans un local commercial. Bien qu’il soit censé être un bar de centre-ville avec des horaires raisonnables, il fonctionne davantage comme un bar de nuit : il reste ouvert jusqu’à 1h du matin les vendredis et samedis, parfois plus tard, et organise des soirées spéciales avec de la musique forte.

Depuis son ouverture, nous subissons des nuisances sonores importantes. La musique est audible jusque dans notre appartement situé au troisième étage, même avec les fenêtres fermées. Cela impacte particulièrement le sommeil de mon enfant en bas âge et notre tranquillité générale. De plus, les bruits liés aux clients (cris, rires, conversations bruyantes) et les manipulations de tables/chaises à la fermeture viennent encore aggraver la situation.

Nous avons tenté de dialoguer avec le gérant du bar, mais aucune amélioration n’a été apportée. Nous avons également contacté notre syndic, qui a adressé des mises en demeure au propriétaire et au gérant, et avons tenté une médiation. Malheureusement, le gérant conteste tout en bloc, minimise les nuisances et nie les impacts.

Règlement de copropriété et article 12

Notre règlement de copropriété contient un article 12 qui stipule :

“Les copropriétaires et occupants devront veiller à ce que la tranquillité de l’immeuble ne soit à aucun moment troublée par leur fait, celui des personnes de leur famille, de leurs invités, de leurs clients ou des gens à leur service. […] Tout bruit ou tapage, de quelque genre que ce soit, troublant la tranquillité des occupants est formellement interdit, alors même qu’il aurait lieu à l’intérieur des appartements.”

À mon sens, cet article n’est clairement pas respecté. Malgré cela, le gérant du bar continue à affirmer qu’il est dans son droit.

Nos questions

1. Quelle est la portée juridique de cet article 12 ? Est-il possible de s’appuyer dessus pour faire cesser les nuisances ?

2. Quels recours pouvons-nous envisager si la médiation échoue, sachant que nous avons des preuves (vidéos, témoignages, échanges écrits) des nuisances ?

3. Devons-nous envisager une procédure judiciaire, et si oui, est-il préférable d’agir contre le propriétaire des murs, le gérant, ou les deux ?

Nous cherchons simplement à retrouver un cadre de vie normal. Si vous avez des conseils ou des retours d’expérience, je vous remercie d’avance pour votre aide.

1 réponse

_lael_ Messages postés 6076 Date d'inscription   Statut Membre Dernière intervention   2 937
 

"1. Quelle est la portée juridique de cet article 12 ? Est-il possible de s’appuyer dessus pour faire cesser les nuisances ?"

A priori oui, mais il faudra malgré tout se référer aux dispositions légales liées au bruit et notamment à d'éventuels arrêtés locaux.

Ces dispositions sont un bon début pour faire reconnaître l'existence d'un trouble de voisinage et de tapage nocturne.



"2. Quels recours pouvons-nous envisager si la médiation échoue, sachant que nous avons des preuves (vidéos, témoignages, échanges écrits) des nuisances ?"

Il faut déjà réunir des preuves du trouble.

Typiquement en faisant constater le caractère répété des troubles de voisinage : main courante (tapage nocturne auprès de la police), témoignages, etc...

Exiger la prise de mesure d'insonorisation et que le bar maintienne ses fenêtres fermées et fasse une sensibilisation auprès de ses clients qui sortent fumer.

En insistant sur le fait que si rien est fait une procédure en vue de la résiliation du contrat de location sera mise en œuvre par le biais d'une AG de copropriété ou par vous-même à titre personnel.

Vous pouvez évoquer la jurisprudence mentionnée plus bas quant aux conséquences (résiliation du bail) si aucun accord amiable n'est trouvé et que les troubles persistent.



"3. Devons-nous envisager une procédure judiciaire, et si oui, est-il préférable d’agir contre le propriétaire des murs, le gérant, ou les deux ?"

Le propriétaire-bailleur et le locataire, si la procédure visant à la résiliation du contrat de location est votée en AG.

Les deux précédents + le SDC si vous faites la procédure en votre nom propre.
 

Car vous ne pouvez pas demander vous-même la résiliation du contrat du locataire en assignant uniquement le locataire, vous seriez déclaré irrecevable pour défaut de capacité à agir.

Cependant, la loi permet à un créancier de se substituer à un débiteur en situation de carence dans l'exercice de ses droits, cela s'appelle une action oblique (article 1341-1 du Code Civil).
Par "débiteur" il est question d'une personne morale ou physique ayant des obligations légales envers une autre personne physique ou morale qualifiée de "créancier". Ce n'est pas forcément une histoire d'argent, cela peut être le simple fait de respecter des dispositions contractuelles ou légales.

Typiquement, seul le bailleur peut résilier le contrat d'un locataire qui ne respecte pas les dispositions contractuelles du contrat, le règlement de copropriété ou la loi.
Mais le syndic, qui représente le SDC, peut se substituer au propriétaire-bailleur qui ne fait pas respecter le règlement de copropriété auprès de son locataire.
A votre tour, en tant que copropriétaire, vous pouvez vous substituer au SDC pour les mêmes raisons s'il ne demande pas au copropriétaire-bailleur de faire respecter le RCP à son locataire.

Tous les acteurs en situation de carence doivent être partie au procès et leur carence démontrée pour que votre capacité à agir soit reconnue.

Pour établir la carence il faut bien évidemment adresser au préalable des mises en demeure.




Exemple de jurisprudence : Cour de cassation, civile, Chambre civile 3, 8 avril 2021, 20-18.327


Extraits de la décision :

"6. [...] il est jugé qu'un syndicat de copropriétaires a, en cas de carence du copropriétaire-bailleur, le droit d'exercer l'action oblique en résiliation du bail dès lors que le locataire contrevient aux obligations découlant de celui-ci et que ses agissements, contraires au règlement de copropriété, causent un préjudice aux autres copropriétaires [...]"

"8. [...] tout copropriétaire peut, à l'instar du syndicat des copropriétaires, exercer les droits et actions du copropriétaire-bailleur pour obtenir la résiliation d'un bail lorsque le preneur méconnaît les stipulations du règlement de copropriété contenues dans celui-ci."

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