Bon de visite : quelle valeur juridique ?

"Bon de visite : quelle valeur juridique ?"

Le bon de visite que l'agent immobilier fait signer à un acheteur potentiel a-t-il une valeur juridique ? Peut-on acheter directement au vendeur sans verser de commission à l'agent immobilier ?

Qu'est-ce qu'un bon de visite ?

Le bon de visite est un document qu'un agent immobilier peut faire signer à l'acheteur potentiel d'un bien immobilier après une visite. En le signant, l'acquéreur potentiel reconnait avoir visité la maison ou l'appartement en vente par l'intermédiaire de l'agent immobilier concerné. Ce bon de visite peut notamment servir au professionnel afin de rendre compte au vendeur des visites effectuées. Parfois, ce bon de visite prévoit l'obligation pour le visiteur qui voudrait acquérir le bien de conclure la transaction avec l'agent immobilier ou, à défaut, de lui verser un dédommagement égal à la commission qu'il aurait dû percevoir.

Quelle est la valeur d'un bon de visite ?

Le bon de visite constitue essentiellement une preuve écrite de l'intervention de l'agent immobilier, qui lui permet notamment de justifier son activité auprès du vendeur qui l'a mandaté. Mais ses conséquences juridiques en termes d'engagements sont limitées vis-à-vis de l'acheteur potentiel.

Si l'agent immobilier a reçu un mandat de vente immobilière simple, non exclusif, de la part du vendeur, l'acquéreur potentiel qui visite le bien n'a aucune obligation d'acheter par son intermédiaire. La clause d'engagement figurant généralement sur le bon de visite a peu de valeur juridique dans la mesure où elle est contraire aux dispositions du décret 72-678 du 20 juillet 1972 (arrêts de la Cour de cassation du 28 novembre 2000, du 3 avril 2002 et du 27 avril 2004).

Cette clause de dédommagement n'engage pas vraiment l'acquéreur. Juridiquement, le bon de visite n'est pas assimilable à un mandat de recherche. Il ne constitue qu'une trace de la visite effectuée par l'agent immobilier. L'acheteur peut donc parfaitement conclure la transaction avec une autre agence immobilière ou directement avec le vendeur pour éviter les frais d'agence pour une vente immobilière.

En revanche, en présence d'un mandat exclusif donné par le vendeur à l'agent immobilier, l'acheteur est obligé de conclure la transaction par son intermédiaire. Qu'il ait signé ou pas de bon de visite. Il en est de même quand le vendeur a confié un mandat non exclusif mais à un seul agent immobilier.

De son côté, et d'une manière générale, le vendeur doit respecter les termes du mandat de vente immobilière qu'il a confié à l'agent immobilier. Faute de quoi, celui-ci sera en droit de lui demander des dommages et intérêts.

Que risque-t-on à contourner l'agent immobilier ?

Même si la valeur juridique stricto sensu du bon de visite est sujette à caution, les acheteurs indélicats s'exposent à une demande de dommages-intérêts de la part de l'agent immobilier concerné. En effet, dans un arrêt en date du 1er février 2011, la Cour d'appel de Toulouse a condamné un acquéreur pour « manquement grave à son obligation de loyauté ». En d'autres termes, l'acheteur risque de devoir payer des dommages et intérêts dès lors qu'il se livre à des manoeuvres pour priver l'agent immobilier de sa commission et que l'intervention de ce dernier a été dans les faits déterminante pour la réalisation de la transaction.

Dans la pratique, si vous concluez directement la transaction avec un acheteur qui a signé un bon de visite, l'agent immobilier peut s'estimer lésé (à juste titre) et pourra exiger des dommages-intérêts de la part des deux parties. A condition naturellement qu'il prouve que son intervention a été décisive dans la conclusion de la vente.

Une condition que les tribunaux évaluent assez largement. Exemple : détenteur d'un mandat donné par le vendeur, un agent immobilier fait visiter un bien à un acquéreur potentiel. Dix-neuf mois plus tard, celui-ci conclut la transaction directement avec le vendeur, pour un prix nettement inférieur. La Cour de cassation a considéré que l'agent avait droit à la commission fixée dans le mandat (arrêt du 14/11/2000).

D'une façon générale, ne traitez pas l'agent immobilier à la légère. Un mandat est un contrat comme un autre et vous devez respecter vos engagements, sans chercher à « contourner » un professionnel, qui, la plupart du temps, a consacré temps et argent pour remplir ses obligations. C'est une question de morale... et de prudence, puisque vous risquez d'être condamné par la justice.

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