Ripostes. C'est un scandale
Un ministre italien invente la carte de séjour à points
Roberto Maroni, ?chargé de l'Intérieur, veut soumettre ?les migrants à de nouvelles épreuves.
Vous êtes immigré en Italie? ? ?Attention à bien vous conduire. Car le permis à points arrive. Mais la dernière trouvaille du ministre de l'Intérieur, Roberto Maroni, ne vise pas à éviter les accidents routiers. Il s'agit du « permis de séjour à points ». Le projet de ce dirigeant de la Ligue du Nord, parti séparatiste et xénophobe membre de la coalition gouvernementale, sera présenté dans les prochains jours au Conseil des ministres.
Le jeu est aussi sinistre que simple? : l'immigré doit recueillir en deux ans trente points. S'il ne les atteint pas, « Game over », la case expulsion l'attend. Le ministre voit là un système qui sert à « garantir l'intégration ». Il s'agit plutôt d'une « course d'obstacles », selon l'Association catholique des travailleurs italiens, alors que le chemin pour être en règle, pour un citoyen immigré, est déjà « tortueux ». La droite cherche à instrumentaliser l'angoisse ressentie par une partie de son électorat face aux mutations à l'oeuvre dans la péninsule. En l'espace d'une génération, l'Italie est passée de nation d'émigration à terre d'accueil. Le nombre de mariages mixtes est en augmentation. Le pays vieillit, avec 1,2 enfant par femme, l'un des taux de natalité les plus bas d'Europe. Dans un tel contexte, le recours à l'immigration est nécessaire pour faire tourner les entreprises, maintenir le niveau des pensions, et s'occuper des personnes âgées. D'ailleurs, le gouvernement Berlusconi lui-même se trouve contraint de régulariser plusieurs centaines de milliers d'aides à domicile, pour répondre aux besoins sociaux criants, mais aussi pour ne pas avoir à traîner devant les tribunaux les centaines de milliers de familles qui les emploient.
Comment obtenir ces trente points? ? Tout d'abord en ne commettant aucun délit, sous peine d'en perdre. Pour en engranger, il faut apprendre la langue italienne en deux ans - des cours seront dispensés par l'État -, être inscrit au service sanitaire, envoyer ses enfants à l'école ou encore respecter « la transparence des contrats d'habitation ». Comme si les migrants se dirigeaient naturellement vers des marchands de sommeil pour loger leurs familles. Plus cocasse, un immigré devra connaître la Constitution italienne. Une obligation à laquelle auraient bien du mal à se conformer nombre de citoyens italiens tel le président du Conseil Silvio Berlusconi. Le promoteur de lois antisociales sait-il que « l'Italie est une République démocratique fondée sur le travail » (art. 1). Celui qui tente de faire passer cette semaine sa vingtième loi pour se sortir des ennuis judiciaires connaît-il l'article 3? : « Tous les citoyens sont égaux devant la loi. » Et l'ex-valet de George W. Bush a-t-il entendu parler de l'article 11? : « L''Italie refuse la guerre (...) comme moyen de résolution des controverses internationales. »
Gaël De Santis
Bien à vous,