Séparation de biens : succession et régime des biens propres
Le régime de la séparation de biens, adopté avant ou après un mariage, permet de bien distinguer le patrimoine des deux conjoints, notamment en cas de succession. Ce que prévoit le Code civil sur la séparation de biens.
Comment fonctionne la séparation de biens ?
Comme son nom l'indique, le régime matrimonial de la séparation de biens permet de séparer les patrimoine des époux. Une précaution parfois utile, notamment en cas de remariage, en présence d'enfants d'un premier lit, ou de création d'entreprise par exemple, quand l'un des conjoints exerce une activité professionnelle « à risques ». Un couple ayant opté pour la séparation de biens peut toujours décider de changer de régime matrimonial au cours du mariage. Le choix du régime nécessite d'établir un contrat de mariage devant un notaire. Les époux restent libres d'aménager certaines règles dans leur contrat, tout en restant soumis aux dispositions légales posées par les articles 1536 à 1543 du Code civil qui encadrant la séparation de biens.
Le régime de la séparation de biens distingue deux types de biens : les biens propres du conjoint et les biens propres de l'autre. Et cela quel que soit la date ou le mode d'acquisition de ces biens (avant ou après le mariage, achat, donation, succession). Contrairement au régime de la communauté légale, chaque conjoint est donc propriétaire exclusif des salaires et gains de son travail et des revenus de ses biens. Le conjoint qui achète un bien mobilier ou immobilier à son nom est donc supposé propriétaire de ce bien, quel que soit le mode de financement et même si l'autre conjoint apporte sa contribution financière. Toutefois, le conjoint qui participe financièrement à l'acquisition d'un bien propre à l'autre conjoint peut exiger une compensation lors de la liquidation du régime. Mais la propriété du bien lui-même ne sera pas remise en cause.
Comment liquider le régime de séparation de biens lors d'une succession ?
En principe, la liquidation du régime de la séparation de biens au moment d'une succession ne pose aucun problème puisqu'il n'existe, par définition, pas de biens communs et que chaque patrimoine est séparé. Après le décès, le conjoint survivant reste donc en principe propriétaire de ses biens propres. Mais dans la pratique, plusieurs difficultés peuvent surgir.
Le partage des biens indivis est soumis au régime classique de l'indivision. Les époux peuvent prévoir que ces biens indivis reviendront au conjoint survivant. Mais comme il ne s'agit pas de biens communs, cette décision est assimilée à une donation au dernier vivant, qui est soumise aux droit de succession et qui doit respecter les parts minimales des intérêts réservataires (les enfants).
Quand un conjoint a donné une somme d'argent à l'autre pour lui permettre d'acheter un bien à son nom ou d'améliorer un bien propre, ce financement gratuit peut être assimilé à une donation. Un conjoint ayant participé directement ou indirectement à l'enrichissement de l'autre sans contrepartie aucune peut également exiger une indemnité. C'est par exemple le cas quand une épouse participe bénévolement à l'activité professionnelle de son mari. Si cette participation dépasse la contribution normale aux charges du mariage, le conjoint lésé peut prétendre à une indemnité qui prendra en compte d'une part la rémunération qu'il aurait pu obtenir et d'autre part l'accroissement du patrimoine de l'autre.
Il peut arriver qu'un seul des conjoints soit mentionné dans l'acte de propriété alors que l'autre a participé financièrement à son acquisition. Dans ce cas, lors de la liquidation du régime de la séparation de biens, le conjoint lésé pourra demander à la justice le versement d'une compensation à condition :
- de prouver qu'il a financé en partie l'achat du bien ;
- que ce financement ne pouvait pas être assimilé à une donation de sa part.
Naturellement, les conjoints peuvent aussi aménager le régime de la séparation de biens par des conventions matrimoniales particulières (attribution du logement au survivant, etc).
Quel est le régime des biens propres ?
Dans le régime de la séparation de biens, chaque conjoint conserve la gestion, la jouissance et la libre disposition de ses biens propres sans avoir besoin du consentement de l'autre conjoint. Ce principe général comporte plusieurs exceptions.
- Le conjoint qui possède en propre le logement familial ne peut en disposer sans le consentement de l'autre conjoint.
- Chaque conjoint doit également contribuer aux charges du ménage, quelle que soit l'importance de ses biens propres.
- Quand l'un des conjoints se trouve « hors d'état de manifester sa volonté » (maladie, absence, etc.), l'autre conjoint peut demander à la justice l'autorisation d'administrer ses biens propres.
- Quand un des conjoints manque gravement à ses devoirs et met en péril les intérêts de la famille, l'autre peut demander l'intervention du juge des affaires familiales. Il peut notamment obtenir un droit de regard sur la gestion des biens propres de l'époux « fautif ».
Il est fréquent de voir des époux mariés sous le régime de la séparation acheter des biens en commun (logement familial, véhicule, etc.). Dans ce cas, ces biens sont soumis au régime classique de l'indivision : chaque conjoint est copropriétaire du bien en fonction de sa quote-part, proportionnelle en principe à son apport. Les sommes figurant sur un compte bancaire joint sont présumés appartenir pour moitié aux deux époux, même s'il est alimenté par l'un d'entre eux seulement.
Faute de justificatifs, il peut arriver que la propriété exclusive d'un bien ne puisse être prouvée. Dans ce cas, chaque conjoint est supposé propriétaire indivis de la moitié du bien. D'où la nécessité de se ménager des moyens de preuve pour justifier l'origine des fonds utilisés pour l'acquisition. Dans le contrat de mariage, les époux peuvent aussi stipuler que tel ou tel bien, quel que soit son origine ou son financement, appartiendra à l'un d'entre eux seulement ou constituera à l'inverse un bien commun.
Qui est responsable des dettes en cas de séparation de biens ?
Chaque époux en séparation de biens est seul responsable des dettes qu'il contracte en son nom et de celles liées à ses biens propres. Toutefois, quel que soit le régime matrimonial et même s'ils sont séparés de biens, les époux sont solidairement responsables des dettes relatives à l'entretien du ménage et à l'éducation des enfants.
La solidarité peut par exemple jouer pour le loyer du logement familial, les cotisations sociales impayées, etc. En matière fiscale, les conjoints sont également solidaires du paiement de l'impôt sur le revenu, de l'impôt sur la fortune et de la taxe d'habitation. Naturellement, la solidarité peut également naître si les époux souscrivent ensemble un emprunt ou se porte caution l'un de l'autre. Chacun étant responsable sur ses biens propres des dettes personnelles qu'il contracte, si l'un des conjoints paie les dettes de l'autre, l'administration fiscale peut à juste titre considérer qu'il s'agit d'une donation indirecte.
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