Contestation d'un congé bloque la procédure d’expulsion ?
_lael_ Messages postés 6078 Date d'inscription Statut Membre Dernière intervention -
Bonjour,
Je suis propriétaire à Paris et j'avais fait une demande de congé à un locataire il y a plus de six mois.
Ce matin, mon locataire m'a informé par email qu'il a envoyé un accusé de réception pour contester ma demande de congé.
Bien que je n'aie pas encore reçu l'accusé de réception, je pense que sa contestation est totalement infondée. En effet, son email ne conteste pas la "validité" du congé, mais décrit plutôt les différents problèmes qu'il a rencontrés durant sa location, tels que les pannes de chaudière, les travaux bruyants, etc.
Je tiens à préciser que ma demande de congé a été rédigée puis envoyée par huissier en temps et en heure : nous sommes à la 3e anniversaire du contrat et plus de six mois à l'avance avec les motifs légitime et sérieux.
Cependant, je me pose désormais les questions suivantes :
Est-ce que je peux ignorer sa contestation et poursuivre la procédure d'expulsion, étant donné qu'il est censé partir fin de cette semaine ou cela bloque la procédure ?
Dois-je répondre à sa lettre AR à sa réception ?
Existe-t-il un délai pour qu'un locataire puisse contester ? Le temps que je reçois son AR, il était déjà censé avoir quitté le logement.
Merci à vous
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1 réponse
"Est-ce que je peux ignorer sa contestation et poursuivre la procédure d'expulsion, étant donné qu'il est censé partir fin de cette semaine ou cela bloque la procédure ?"
Quelle procédure d'expulsion ?
La loi prévoit que seul un juge peut ordonner une expulsion.
Votre ex-locataire est désormais un "occupant sans droit ni titre" puisque le congé vaut absence de renouvellement du contrat de location.
Mais ça ne vous confère pas le droit de l'expulser vous-même ni de rentrer dans le logement.
Si vous tentez de l'évacuer du logement avec ses affaires vous risquez toute une série de sanctions pénales :
Article 226-4-2 du Code Pénal : "Le fait de forcer un tiers à quitter le lieu qu'il habite sans avoir obtenu le concours de l'Etat dans les conditions prévues à l'article L. 153-1 du code des procédures civiles d'exécution, à l'aide de manœuvres, menaces, voies de fait ou contraintes, est puni de trois ans d'emprisonnement et de 30 000 € d'amende."
Article 226-4 du Code Pénal : "L'introduction dans le domicile d'autrui à l'aide de manoeuvres, menaces, voies de fait ou contrainte, hors les cas où la loi le permet, est puni de trois ans d'emprisonnement et de 45 000 euros d'amende."
Car un logement occupé est considéré comme le domicile de celui qui l'occupe, même si l'occupation est illégale et sans titre (pas de bail).
A noter que l'occupation du logement sans titre n'est pas passible de sanctions pénales pour l'occupant, c'est considéré comme un litige civil donc tout au plus passible d'indemnités d'occupation au profit du propriétaire.
En gros, le locataire sera juste condamné à vous verser l'équivalent du loyer qu'il vous versait jusqu'à présent, vous avez peu de chance d'obtenir quoique ce soit de plus.
Et pendant ce temps il pourra rester dans le logement sans plus de conséquences.
"Dois-je répondre à sa lettre AR à sa réception ?"
Vous pouvez éventuellement le faire pour prouver votre bonne foi si cela devait aller au tribunal afin de montrer que vous avez privilégié le dialogue en démontrant au locataire que vous étiez dans votre bon droit.
Avec un peu de chance, le juge vous accordera peut-être la somme exceptionnelle de 300€ de dommages et intérêts si vous arrivez à démontrer un comportement abusif et de mauvaise foi de l'occupant qui se maintient dans le logement en connaissance de cause.
"Existe-t-il un délai pour qu'un locataire puisse contester ? Le temps que je reçois son AR, il était déjà censé avoir quitté le logement."
Ce n'est pas la bonne question à vous poser, car le locataire n'a pas besoin de contester, il a juste besoin de rester dans les lieux.
Car en l'état de la loi, c'est à vous de faire "valider le congé" par un juge de sorte à ce qu'une expulsion soit prononcée.
L'occupant a donc tout intérêt à faire trainer les choses pour retarder d'autant votre saisie du tribunal.
Sachant qu'une telle procédure prend à minima 9 mois et peut dépasser les 2ans si l'occupant est "bien conseillé" pour faire retarder au maximum la procédure.
Bon après il y a aussi une petite chance que si vous faites des demandes particulièrement élevées : indemnités d'occupation = loyer x3, 5000€ de dommages et intérêts, 2000€ de frais irrépétibles, etc... que ça lui fasse peur et qu'il accepte de partir spontanément contre l'abandon des poursuites.
Mais en réalité de telles demandes vont juste faire rire la plupart des juges.
Enfin, il paraît que certains juges restent attachés au principe d'"indemnisation totale du préjudice" et accordent volontiers des indemnités d'occupation majorées, le remboursement total des frais de justice et des dommages et intérêts à la hauteur du préjudice.
Mais personnellement je cherche encore de tels juges, j'en ai pour le moment jamais vu.
Ceux que je connais ne veulent pas accabler les pauvres locataires victimes de l’oppression des méchants bailleurs, en caricaturant à peine.
Je vous invite à vous rapprocher de votre huissier pour savoir la suite à donner, il pourra probablement pour prendre une date d'audience au tribunal et vous rédiger une assignation aux fins de faire valider le congé, accorder des indemnités d'occupation et de prononcer l'expulsion du locataire.
Le coût de la seule rédaction sera probablement autour des 500€.
Par contre à ce prix-là vous devrez aller vous-même à l'audience pour reprendre oralement les grandes lignes de l'assignation : vos demandes et présenter vos pièces (la demande de congé, le contrat de location, etc...)
Mais si vous passez par un avocat ce sera 2000€, mais il s'occupera de tout : rédaction et représentation à l'audience.
Sachant que les juges accordent rarement plus de 300€ en remboursement des frais de justice, au mieux j'ai vu 500€ accordé à un bailleur représenté par avocat.
Vous risquez donc d'en être pour 1500€ de votre poche si vous prenez un avocat.
Vous aurez probablement du mal à digérer cet état de fait, mais c'est bien la réalité.
Bon courage, vous en aurez besoin.