Destination des lieux et changement d'activité : bail commercial

Destination des lieux et changement d'activité : bail commercial La destination des lieux est l'activité industrielle, artisanale ou commerciale pour laquelle le local est loué avec un bail commercial. Le changement d'activité a donc des conséquences importantes.

Quelles sont les règles sur la destination des lieux dans un bail commercial ?

La destination des lieux, à savoir l'activité du locataire du bail commercial, est prévue dans le contrat et ne peut être modifiée sans l'accord du bailleur. Dans la pratique, un changement d'activité implique d'examiner si la nouvelle activité entre dans le champ de la destination contractuelle, ce qui relève de l'appréciation souveraine du juge.

Par exemple, certains tribunaux ont décidé que la vente de boissons rafraîchissantes n'entre pas dans la destination d'un commerce de boulangerie-pâtisserie.

Si le contrat ne stipule rien, le juge peut rechercher l'intention des parties mais le doute semble plutôt profiter au locataire en jurisprudence.

Qu'est-ce que la déspécialisation partielle ?

Lorsque le bailleur s'oppose à la modification de la destination des locaux, le locataire dispose d'une procédure de déspécialisation, soit partielle soit plénière. La déspécialisation partielle consiste à ajouter à la spécialité prévue au contrat des activités connexes ou complémentaires. Le bail commercial ne peut l'interdire. Une activité est dite « connexe » lorsqu'elle a un rapport étroit avec l'activité principale. Elle est dite « complémentaire » lorsqu'elle s'avère utile ou nécessaire à un meilleur exercice de l'activité principale.

Exemples : la « petite restauration » est complémentaire de l'activité de glacier ; le commerce de café-bar est complémentaire de l'activité de restauration rapide.

La procédure est simple :

  • Le locataire doit notifier son intention au bailleur qui a deux mois pour contester. La contestation ne peut porter que sur la connexité ou la complémentarité des activités.
  • Si le bailleur conteste dans les délais le caractère connexe ou complémentaire, l'une des parties peut saisir le tribunal judiciaire (TJ) qui se prononcera, en fonction des usages commerciaux.
  • Si le bailleur ne conteste pas ou s'il le fait après le délai, le locataire peut procéder à l'ajout de la nouvelle activité mentionnée.

Le locataire ne peut en aucun cas commencer la nouvelle activité avant la réponse positive du bailleur ou du juge.

La possibilité de déspécialisation est d'ordre public, c'est-à-dire qu'aucune clause ne peut y faire obstacle. Une clause de non-concurrence ou d'exclusivité consentie à un autre locataire par le bailleur ne peut notamment y faire échec.

Lorsque des travaux sont nécessaires au changement d'activité, ils ne doivent pas excéder six mois à compter de l'autorisation. Dans le cas contraire, le bailleur pourrait invoquer la clause de résiliation en cas de cessation d'activité.

Si les nouvelles activités entraînent une modification de la valeur locative du local, le loyer pourra être revu en conséquence lors de la prochaine révision triennale du bail commercial (art. L145-47 al.3 du Code de commerce) ou déplafonné lors du renouvellement.

Qu'est-ce que la déspécialisation plénière ?

Dans ce cas, la nouvelle activité est fondamentalement différente de l'ancienne. En principe, la dé-spécialisation plénière n'est pas possible sous réserve de certaines exceptions. Deux conditions sont exigées (art. L. 145-48 du Code de commerce).

  • 1. Le changement doit être motivé à la fois par une certaine conjoncture économique et par une organisation plus rationnelle du secteur d'activité. On peut par exemple considérer qu'il existe trop de pressing dans un même quartier, ou à l'inverse qu'il n'existe pas assez de service de restauration.
  • 2. Le changement doit être conforme à la destination et aux caractéristiques de l'immeuble ou de la copropriété.

Le changement s'opère de la façon suivante :

  • Le locataire doit demander l'autorisation au bailleur et détailler avec précision les activités envisagées : une demande trop générale serait nulle.
  • Le locataire doit notifier sa demande aux éventuels créanciers inscrits au fonds de commerce.
  • Le cas échéant, le bailleur informe les locataires qui bénéficient d'une clause de non-concurrence.
  • Le bailleur a trois mois pour accepter, refuser ou poser ses conditions.

En cas de désaccord, le litige est porté devant le tribunal judiciaire qui apprécie notamment la légitimité des motifs de refus invoqués par le bailleur.

Départ à la retraite ou invalidité

En cas de départ à la retraite ou d'invalidité du locataire, la loi prévoit le droit pour ce dernier de céder le bail avec changement d'activité sauf en cas d'incompatibilité avec la destination et les caractéristiques de l'immeuble (art. L. 145-51 du Code de commerce). La demande doit être signifiée au bailleur et aux créanciers. Elle doit comporter la nature des activités envisagées et le prix de la cession. Le bailleur peut alors :

  • racheter le bail aux conditions proposées dans un délai de deux mois.
  • s'opposer au changement et saisir le tribunal judiciaire dans un délai de deux mois.