Deux fois plus de propriétaires ont eu recours à cette procédure l'an dernier - elle leur permet de perdre moins d'argent
Alors que la crise du pouvoir d'achat s'aggrave, le marché locatif vacille sous le poids des impayés. Un climat d'instabilité qui fragilise aussi bien les locataires précaires que les propriétaires inquiets.
Le marché locatif français traverse en effet une zone de fortes turbulences. D'après la Chambre nationale des commissaires de justice (les anciens huissiers), en 2024, pas moins de 171 000 commandements de payer ont été délivrés, soit 11 % de plus qu'en 2023. Ce chiffre illustre la difficulté croissante pour de nombreux ménages à assumer leurs dépenses locatives, dans un contexte d'inflation persistante et de revenus stagnants.
En effet, les impayés de loyers se multiplient, et avec eux, les commandements de payer et de quitter les lieux. Un cercle vicieux qui rend les propriétaires de plus en plus frileux à louer, surtout à des profils modestes ou jugés à risque. Résultat : la tension locative se renforce, l'offre se rétracte, et les ménages les plus vulnérables se retrouvent bien souvent dans l'impossibilité de trouver un logement adapté à leur situation familiale.
Pire encore, un autre phénomène inquiète les commissaires de justice : les abandons de logement, ou "départs à la cloche de bois". Des locataires quittent les lieux sans donner congé ni remettre les clés, laissant les propriétaires désemparés et les logements bloqués administrativement pendant des mois. En 2024, 5 350 constats d'abandon ont été dressés, un record, en hausse de 8 % sur un an.
Mais une procédure en lien avec la location connait une hausse bien plus forte encore. Elle est directement liée aux loyers impayés. Toujours d'après la Chambre nationale des commissaires de justice, les expulsions locatives ont ainsi bondi de 87 % en un an. Elles ont donc quasiment doublé ! Un chiffre inédit qui alarme les professionnels de la justice comme les acteurs du logement. En 2024, les expulsions locatives ont fait l'objet de 24 000 procès-verbaux délivrés, contre 12 825 l'année précédente.
Ce climat d'insécurité, cumulé avec les contraintes techniques et thermiques (DPE, etc.), pousse certains bailleurs à se retirer du marché ou à durcir drastiquement leurs critères de sélection. Les effets sont déjà visibles : raréfaction des offres, augmentation des loyers, discrimination à l'entrée. À terme, c'est tout l'équilibre du parc locatif privé qui est menacé, dans un pays où la moitié des ménages sont locataires.