"Je perds ma prime d'activité et deviens imposable" : comment une augmentation de 450 € peut ne (quasiment) rien rapporter
Une étude récente montre qu'un salarié français peut ne presque rien toucher sur une hausse de salaire, 80 % de la somme déboursée par son employeur étant récupérée par l'Etat.
On refuse rarement une hausse de salaire, encore moins avec la forte hausse des prix de ces dernières années. Mais si une augmentation permet de revaloriser son salaire net, elle peut aussi avoir quelques effets négatifs si l'on tient compte cette fois du revenu disponible, c'est-à-dire du revenu initial augmenté des prestations sociales reçues et diminué des prélèvements obligatoires versés. Une étude récente a ainsi chiffré l'impact réel que peut avoir une hausse de rémunération sur le revenu disponible.
Une hausse de salaire peut en effet être nettement dévaluée par les effets de seuils qu'elle peut mécaniquement entraîner. On songe, par exemple, à la hausse du taux de cotisations sociales dès lors que l'allègement prévu pour les bas salaires prend fin. On pense également au dépassement du seuil d'imposition, qui peut entraîner le prélèvement à la source du salarié qui basculerait dans les tranches de revenus imposables du fait de son augmentation.
La perte ou la baisse de certaines aides sociales peut également largement modérer l'ampleur d'une hausse de salaire. Cette dernière peut en effet engendrer une baisse voire une suppression de la prime d'activité versée chaque mois par la Caf. Cette aide sociale destinée à encourager le travail est en effet calculée en fonction des ressources et de la situation familiale du foyer. Elle est versée à un salarié dont le revenu ne dépasse pas un certain plafond, légèrement supérieur à 2000 € mensuels pour un célibataire.
Dans une étude récente, la Drees (direction de la Recherche, des Études, de l'Évaluation et des Statistiques) a justement évalué le montant qu'un employeur devait débourser pour qu'un salarié au Smic à temps plein bénéficie d'une hausse de 100 € de son revenu disponible. Selon le rapport, l'entreprise devra verser... 442 € de plus par mois. Une large partie de cette somme part dans la forte hausse des cotisations patronales liée à la diminution des allègements pour les bas salaires (212 €) et la hausse des cotisations salariales (+ 48 €).
Dans cet exemple, le salarié augmenté deviendra également imposable à l'impôt sur le revenu et subira un prélèvement à la source de 12 € par mois. Mais surtout, sa prime d'activité sera fortement réduite, avec une baisse de 71 € par mois. Au total, le salarié touchera en gain de revenu disponible moins d'un quart de la hausse de son "superbrut", c'est-à-dire du coût total de cette augmentation pour l'employeur avant prélèvements. Finalement, près de 80 % de la somme déboursée en plus chaque mois par l'entreprise reviendra directement ou indirectement à l'Etat, que cela soit sous forme de cotisations sociales, d'impôt ou de baisse des aides sociales versées.
Et la prime d'activité n'est pas la seule aide de la Caf sujette à ce type d'effets de seuil. On songe notamment aux plafonds de ressources pour toucher certaines prestations familiales, et notamment la prestation d'accueil du jeune enfant ou l'allocation de rentrée scolaire. Des pertes qui, dans les tranches de revenus proches des seuils de versements, peuvent fortement atténuer voire même quasiment annuler une hausse de salaire...