Divorce ou séparation : les juges changent leur position, gare à cette nouvelle règle qui peut coûter cher
Une décision récente de la Cour de Cassation change des règles importantes pour les parents divorcés ou séparés. Un revirement qui peut avoir d'importantes conséquences financières.
La hausse des divorces et des séparations ces dernières décennies a engendré une explosion des contentieux en droit de la famille. Parmi eux, un cas fréquent est lié à la responsabilité de parents séparés en cas de dommage causé par leur enfant. Avec cette question : le parent qui n'a pas la garde de ses enfants doit-il réparer le préjudice subi par la victime, quand bien même le mineur auteur des faits ne vivrait pas chez lui ?
C'est sur ce cas très courant en pratique que la justice vient récemment de trancher, en opérant un revirement de jurisprudence. Dans cette affaire, un enfant de 17 ans s'était rendu responsable de plusieurs incendies entraînant des dommages importants. Ses parents étant divorcés, l'adolescent vivait chez sa mère au moment des faits. La question était alors de savoir si la responsabilité du père pouvait être recherchée alors qu'il n'avait pas la garde de l'enfant.
L'article 1242 du Code civil pose une règle de principe en matière de responsabilité parentale en disposant que "le père et la mère, en tant qu'ils exercent l'autorité parentale, sont solidairement responsables du dommage causé par leurs enfants mineurs habitant avec eux". Seulement voilà : ce texte de loi envisage uniquement la situation dans laquelle l'enfant vit chez ses parents, sans aucune précision sur les règles applicables en cas de séparation. Un flou que la jurisprudence a dû éclaircir.
Jusqu'à maintenant, les juges déduisaient de cette notion de cohabitation fixée par le texte de loi que seul le parent chez qui l'enfant résidait au moment des faits était responsable des dommages qu'il pouvait causer. Et ce, alors même que juridiquement, les deux parents exerçaient conjointement l'autorité parentale.
Dans une décision récente rendue cet été (arrêt de l'assemblée plénière n° 22-84760 du 28 juin 2024), la Cour de Cassation opère un revirement de jurisprudence important sur cette question. Dans cette affaire, la cour d'appel avait reconnu uniquement la responsabilité de la mère de l'enfant. La Cour de Cassation censure cette décision en faisant une nouvelle interprétation de la notion de cohabitation posée par la loi afin de l'élargir au parent exerçant l'autorité parentale et exerçant un droit de visite et d'hébergement. Dès lors, le père divorcé est également responsable du dommage causé par un enfant, quand bien même ce dernier réside chez sa mère.
Seule limite apportée par la Haute juridiction : la responsabilité des parents prend fin dès lors que le mineur est confié à un tiers par une décision administrative ou judiciaire. Mais en dehors de ce cas, les deux parents sont responsables par principe et doivent donc indemniser les victimes des dommages causés par leur enfant.
Cette décision importante de la Cour de Cassation vise également à mieux indemniser les victimes d'infractions commises par des mineurs en mettant en jeu la responsabilité des deux parents, et donc leurs assurances respectives. En effet, la prise en charge par les assurances sont généralement limitées à un plafond, si bien que le préjudice financier subi peut ne pas être intégralement remboursé si les dégâts causés sont importants. C'était justement le cas dans cette affaire, le plafond de garantie de la mère de l'enfant étant insuffisant pour rembourser l'intégralité des dommages.