Solde de tout compte : délai de remise, versement et calcul

"Solde de tout compte : délai de remise, versement et calcul"

Le solde de tout compte peut parfois être source de litiges employeur-salarié. Délai, versement, contestation... Voici les principales règles à connaitre issues de la loi et de la jurisprudence.

Qu'est-ce qu'un solde de tout compte ?

Le solde de tout compte est un document remis par l'employeur au salarié qui quitte l'entreprise. Il dresse l'inventaire de l'ensemble des sommes versées au moment de la rupture du contrat de travail : le dernier salaire, mais aussi les éventuelles primes ou indemnités de rupture. Établi par l'employeur, le solde de tout compte est remis au salarié contre reçu : le reçu pour solde de tout compte. Cette formalité est une obligation imposée par la loi, à l'article L. 1234-20 du Code du travail. Comme le certificat de travail et l'attestation Pôle emploi, le solde de tout compte doit être remis au salarié aussi bien en cas de licenciement qu'en cas de fin de CDD, de CDI, de période d'essai, de signature d'une rupture conventionnelle, de démission, de départ à la retraite, etc.

Juridiquement, le solde de tout compte présente surtout un intérêt pour l'employeur : s'il ne remet pas ce document au salarié contre reçu, ce dernier peut contester le montant des sommes versées au moment de son départ de l'entreprise dans un délai qui varie de 1 an à 3 ans selon la nature des sommes. A contrario, si le salarié signe le reçu du solde de tout compte sans formuler de réserve, son délai pour contester le montant des sommes mentionnées est réduit à 6 mois.

Quel est le délai de remise et de paiement du solde de tout compte ?

Le solde de tout compte doit être établi et payé au moment de la rupture du contrat de travail, conformément aux dispositions de l'article L. 1234-20 du Code du travail. La loi ne prévoit pas de délai supplémentaire après cette rupture. Le solde de tout compte doit impérativement être remis le jour de l'expiration du contrat de travail du salarié, et non avant la fin de celui-ci. Toutefois, si le salarié est dispensé de préavis, le reçu pour solde de tout compte peut lui être remis le jour où le salarié quitte physiquement l'entreprise, sans avoir à attendre l'expiration du préavis. La date de signature du reçu pour solde de tout compte doit figurer sur le document. En revanche, peu importe que cette date soit inscrite ou non par le salarié de sa main : la date est valable dès lors qu'elle est certaine (arrêt n° 17-27600 rendu par la chambre sociale de la Cour de Cassation le 20 février 2019).

Le solde de tout compte est remis au salarié par l'employeur soit en mains propres, soit par lettre recommandée avec accusé de réception. Mais le solde de tout compte est quérable et non portable : l'employeur n'a pas l'obligation d'adresser le solde de tout compte au domicile du salarié. Il peut donc simplement informer le salarié que le document est à sa disposition.

En pratique, il arrive que l'entreprise tarde à remettre et payer le solde de tout compte. Le salarié peut alors adresser à l'employeur une lettre de demande de remise et de paiement du solde de tout compte, en recommandé avec avis de réception. Si le retard persiste, il peut agir devant le conseil de prud'hommes qui pourra contraindre l'employeur à remettre le reçu en prononçant éventuellement une pénalité par jour de retard.

L'employeur ne peut pas conditionner le versement des sommes dues à la signature du reçu pour solde de tout compte. Par conséquent, un salarié qui refuse de signer le reçu doit tout de même percevoir les sommes qui y sont inscrites. Dans le même sens, un employeur ne peut pas se prévaloir d'un reçu pour solde de tout compte non-signé par le salarié pour prouver qu'il lui a bien versé les sommes dues. L'employeur doit prouver le paiement par un autre moyen (arrêt n° 18-12792 rendu par la chambre sociale de la Cour de Cassation le 27 mars 2019).

Comment rédiger et remettre un solde de tout compte ?

Pour se fonder sur un exemple de reçu pour solde de tout compte à faire signer au salarié, l'employeur peut s'aider de notre modèle gratuit de reçu pour solde de tout compte. Si vous avez eu recours au Cesu (en cas d'embauche d'une assistante maternelle par exemple), vous pouvez utiliser un formulaire mis en ligne par l'Urssaf : télécharger le formulaire de reçu pour solde de tout compte Cesu.

Le solde de tout compte doit détailler les sommes versées au moment de la rupture du contrat : salaire dû jusqu'au dernier jour du contrat de travail, heures supplémentaires non récupérées, indemnités de licenciement, prorata d'un éventuel 13e mois, congés payés restants, éventuelles primes, etc. Pour avoir un effet libératoire pour l'employeur, le solde de tout compte doit précisément lister le détail des sommes versées au salarié, et non juste comporter une mention de portée générale. L'employeur ne peut pas, par exemple, se contenter d'indiquer une somme globale dans le reçu pour solde de tout compte et de renvoyer à la fiche de paie annexée au reçu pour le détail des sommes versées au salarié (arrêt n°16-16617 de la Cour de Cassation du 14 février 2018).

Pour être valable, le reçu pour solde de tout compte doit comporter la mention "pour solde de tout compte" écrite à la main par le salarié, suivie de sa signature. Il doit obligatoirement être établi en deux exemplaires : l'un est remis au salarié, l'autre est conservé par l'employeur (article D. 1234-7 du Code du travail).

Comment contester son solde de tout compte ?

Au moment de signer le reçu pour solde de tout compte, le salarié peut formuler des réserves lorsqu'il estime que le montant de tout ou partie des sommes figurant sur l'inventaire est inexact. Pour ce faire, il doit mentionner ses réserves sur le document, en apposant la mention "avec réserves" par exemple. Cette précaution a des conséquences importantes sur le plan juridique puisque le reçu sera dès lors privé de tout effet libératoire pour l'employeur.

Le reçu pour solde de tout compte signé sans réserves par le salarié peut toujours être dénoncé dans les 6 mois qui suivent sa signature. En revanche, la signature du reçu pour solde de tout compte n'empêche pas le salarié de contester son licenciement devant le tribunal par la suite. Le salarié peut donc parfaitement intenter une action devant les prud'hommes contre son employeur sans que la signature du reçu ne puisse lui être opposée.

La réglementation (article D. 1234-8 du Code du travail) impose au salarié de dénoncer le reçu pour solde de tout compte par lettre recommandée. Le courrier doit mentionner les raisons précises de la contestation. Vous pouvez vous aider de notre modèle de lettre de contestation du solde de tout compte pour accomplir vos démarches. Si l'employeur refuse de vous verser les sommes litigieuses après avoir reçu votre demande, le salarié peut agir aux prud'hommes.

Les délais pour contester un reçu pour solde de tout compte varient selon que le salarié a signé ou non le document.

  • S'il l'a signé, le document devient libératoire pour l'employeur pour les sommes mentionnées au bout d'un délai de 6 mois.
  • S'il n'a pas signé le reçu pour solde de tout compte, les délais pour agir devant les prud'hommes sont ceux de l'article L. 1471-1 du Code du travail, à savoir :
    • 1 an pour les sommes liées à la rupture du contrat (indemnité de licenciement, indemnité de préavis, etc.) ;

    • 2 ans pour les sommes liées au contrat de travail (heures supplémentaires, etc.) ;

    • 3 ans pour les salaires non versés.

En cas d'oubli d'une somme due au salarié, la Cour de Cassation (arrêt n° 12-24985 rendu par la chambre sociale de la Cour de Cassation le 8 décembre 2013) considère que le solde de tout compte n'a d'effet libératoire que pour les sommes mentionnées sur le document, et cela même si le reçu prévoit que le salarié reconnait que tout compte avec son employeur se trouve " entièrement et définitivement apuré et réglé ". Ce type de mention n'empêche donc pas le salarié d'agir pour réclamer d'autres sommes ne figurant pas sur le reçu.

  • Légifrance, article L. 1234-20 du Code du travail : https://www.legifrance.gouv.fr/codes/id/LEGISCTA000006195629
  • Légifrance, article L. 1471-1 du Code du travail : https://www.legifrance.gouv.fr/codes/article_lc/LEGIARTI000036762126
  • Légifrance, article D. 1234-7 du Code du travail : https://www.legifrance.gouv.fr/codes/article_lc/LEGIARTI000018537552
  • Légifrance, article D. 1234-8 du Code du travail : https://www.legifrance.gouv.fr/codes/article_lc/LEGIARTI000018537550
  • Cour de Cassation, arrêt 17-27600 : https://www.courdecassation.fr/decision/5fca7755d5fc3e64e13cebcd
  • Cour de Cassation, arrêt n° 18-12792 : https://www.courdecassation.fr/decision/5fca73e3a823aa60aa6c08dc
  • Cour de Cassation, arrêt n° 12-24985 : https://www.courdecassation.fr/decision/6079c3cc9ba5988459c573da
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