Hiérarchie des normes et droit du travail : définition

"Hiérarchie des normes et droit du travail : définition"

Le droit du travail sur la hiérarchie des normes entre la loi, la convention collective, l'accord de branche et l'accord d'entreprise. Le point sur les règles de la négociation collective.

Qu'est-ce que la hiérarchie des normes en droit du travail ?

Avant la loi Travail de 2016 et les ordonnances Macron de septembre 2017, le Code du travail reposait sur un principe simple.

  • La loi fixait des règles générales qui garantissaient des droits minimaux aux salariés.
  • La convention collective pouvait fixer des règles différentes, à condition qu'elles soient plus favorables aux salariés.
  • De même, l'accord d'entreprise pouvait lui aussi fixer des règles différentes si et uniquement si elles amélioraient la protection du salarié.

En cas de conflit entre différentes normes, c'est donc la norme la plus favorable au salarié qui l'emportait. La loi El Khomri et plus encore les ordonnances Macron renversent ce principe. Désormais, l'entreprise ou l'établissement est le lieu privilégié de la négociation collective, où s'élaborent les règles régissant les rapports entre les salariés et l'employeur.

En d'autres termes, la convention de branche peut prévoir des règles différentes de la loi (qui ne fixent plus que des principes généraux), y compris si ces règles sont moins favorables aux salariés. De même, l'accord d'entreprise peut prévoir des règles moins favorables que celles de l'accord de branche, même quand elles sont moins favorables aux salariés.

Schématiquement et en principe, l'accord d'entreprise prime donc désormais sur l'accord de branche, qui prime lui-même sur la loi. Mais cette hiérarchie des normes comporte plusieurs exceptions reposant sur trois blocs thématiques.

Quand l'accord de branche prime-t-il sur l'accord d'entreprise ?

L'ordonnance 1385 du 22 septembre 2017 fixent une liste limitative de 13 domaines pour lesquels l'accord de branche prime sur l'accord d'entreprise, même si ce dernier a été conclu avant la promulgation de l'ordonnance. Ce bloc numéro un concerne les salaires minima, les classifications, la protection sociale complémentaire, certaines mesures liées à la durée du travail, au CDD etc.

  • Les salaires minima hiérarchiques,
  • Les classifications,
  • La mutualisation des fonds de financement du paritarisme,
  • La mutualisation des fonds de la formation professionnelle,
  • Les garanties collectives complémentaires mentionnées à l'article L. 912-1 du code de la sécurité sociale,
  • Les mesures énoncées à l'article L. 3121-14, au 1° de l'article L. 3121-44, à l'article L. 3122-16, au premier alinéa de l'article L. 3123-19 et aux articles L. 3123-21 et L. 3123-22 du Code du travail et relatives à la durée du travail, à la répartition et à l'aménagement des horaires,
  • Les mesures relatives aux contrats de travail à durée déterminée et aux contrats de travail temporaire énoncées aux articles L. 1242-8, L. 1242-13, L. 1244-3, L. 1251-12, L. 1251-35 et L. 1251-36 du Code du travail,
    • notamment le nombre maximal de renouvellements d'un CDD,

    • et les cas de non application du délai de carence entre deux CDD.

  • Les mesures relatives au contrat à durée indéterminée de chantier énoncées aux articles L. 1223-8 du Code du travail,
  • L'égalité professionnelle entre les femmes et les hommes,
  • Les conditions et les durées de renouvellement de la période d'essai mentionnées à l'article L. 1221-21 du code du travail,
  • Les modalités selon lesquelles la poursuite des contrats de travail est organisée entre deux entreprises lorsque les conditions d'application de l'article L. 1224-1 ne sont pas réunies,
  • Les cas de mise à disposition d'un salarié temporaire auprès d'une entreprise utilisatrice mentionnés aux 1° et 2° de l'article L. 1251-7 du Code du travail
  • La rémunération minimale du salarié porté, ainsi que le montant de l'indemnité d'apport d'affaire, mentionnée aux articles L. 1254-2 et L. 1254-9 du Code du travail.

Dans tous ces domaines, l'accord de branche fixe des règles, et ces règles ne peuvent être modifiées par l'accord d'entreprise que dans un sens plus favorable aux salariés. En l'absence d'accord de branche, ce sont les dispositions de la loi qui s'appliquent ou encore celles de l'accord d'entreprise si elles sont plus favorables au salarié.

Bloc 2 : 4 thèmes facultatifs

L'ordonnance dresse une liste limitative de quatre domaines :

  • La prévention de l'exposition aux risques professionnels de l'article L. 4161-1 du Code du travail,
  • L'insertion professionnelle et le maintien dans l'emploi des salariés handicapés,
  • L'effectif à partir duquel les délégués syndicaux peuvent être désignés, ainsi que leur nombre,
  • Les primes pour travaux dangereux ou insalubres.

L'accord de branche peut « verrouiller » ces quatre domaines et interdire aux accords d'entreprise postérieurs de modifier les règles de l'accord de branche. L'accord d'entreprise peut donc intervenir dans ces quatre domaines :

  • soit en l'absence d'accord de branche et à condition de respecter les dispositions légales ou réglementaires,
  • soit en l'absence de clause de verrouillage dans l'accord de branche,
  • soit en prévoyant des règles plus favorables au salarié que celles prévues dans l'accord de branche.

Bloc 3 : les thèmes de l'accord d'entreprise

Les règles de l'accord d'entreprise priment sur celles de l'accord de branche dans tous les autres domaines du droit du travail, qui ne figurent donc ni dans le bloc N°1 ni dans le bloc N°2. En l'absence d'accord d'entreprise, c'est l'accord de branche qui s'applique naturellement.

Exemple : un accord d'entreprise peut prévoir une indemnité de licenciement moins importante que celle prévue par l'accord de branche. À condition toutefois de respecter les planchers fixés par la loi.

Nécessités de fonctionnement de l'entreprise

L'article L. 2254-2 du Code du travail modifié par l'ordonnance 1385 du 22 septembre 2017 autorise également les accords d'entreprise pour répondre aux nécessités du fonctionnement de l'entreprise. Il s'agit non seulement de préserver ou de développer l'emploi mais aussi, dans une perspective plus offensive, de préparer l'entreprise aux évolutions du marché, même en l'absence de difficultés économiques. L'accord d'entreprise peut ainsi :

  • aménager la durée du travail ;
  • aménager la rémunération, dans le respect du smic et des salaires minimaux conventionnels hiérarchiques ;
  • fixer les conditions de la mobilité professionnelle et géographique au sein de l'entreprise.

Le préambule de l'accord doit définir ses objectifs et peut préciser :

  • les modalités d'information des salariés ;
  • la nature des efforts consentis par les dirigeants, les mandataires sociaux et les actionnaires.

Une fois approuvé, l'accord s'applique au contrat de travail du salarié (rémunération, durée du travail, etc.).

Refus du salarié

Le salarié dispose d'un mois après la communication de l'accord approuvé pour refuser son application. Son refus doit être explicite et écrit. Il peut alors être licencié par l'employeur dans le cadre d'un licenciement pour motif personnel. Le motif est considéré par nature « réel et sérieux ». Conséquence : le salarié ne pourra contester son licenciement qu'en cas de non-respect des règles de procédure.

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